TOUT CE QUE VOUS AVEZ TOUJOURS VOULU SAVOIR SUR LA SM... SANS JAMAIS OSER LE DEMANDER !
Une Citroën n'est pas - et n'a jamais été - une voiture comme les autres. La SM encore moins. Née de l'absorption de Maserati par la firme de Javel, blessée à mort par deux crises énergétiques majeures, achevée par la famille Peugeot, la SM aura fait vibrer beaucoup d'ingénieurs, de conducteurs, et de journalistes, sans oublier les petits garçons en culottes courtes. Et encore nous ne savons pas tout !
Extraits :
Pourquoi Citroën achète Maserati ? Le 11 janvier 1968, Maserati et Citroën signe un accord concernant « la conception, la fabrication, et le vente d’automobiles » A ce moment précis, Citroën n’est pas encore majoritaire dans le capitale de l’usine de Modene. Lequel appartient à la famille Orsi qui souhaite rapidement s’en débarrasser…. Les comptes sont dans le rouge, l’endettement de la firme italienne atteint 2.5 millions de dollars fin 1967, en partie à cause d’un programme de F1 désastreux. En effet, depuis le changement de règlementation en 1966, Maserati livre à l’écurie Cooper des blocs V12 3 litres, lourds, fragiles et dépassés en puissance, installés dans des châssis ne valant guère mieux. Les Cooper-Maserati, gagneront deux Grands Prix en deux ans. C’est dont la compétition qui asphyxie Maserati car du coté des voitures de route les Sebring, Quattroporte , Mistral, Mexico, Ghibli, toutes à moteur 6 cylindres en ligne ou V8, jouissent d’une excellente réputation auprès d’une clientèle très exigeante. Fin 1967, la production atteint 624 exemplaires et en 1968 elle dépasse pour la première fois – et la seule – celle de Ferrari : 733 unités contre 730. En mars 1968, au salon de Genève, Citroën fait part de son intention d’entrer dans le capital de Maserati Autmobili S.p.A à hauteur de 80 % par l’intermédiaire de sa holding Citroën S.A que préside Pierre Bercot. La prise de contrôle de Maserati par Citroën est actée le 15 janvier 1969.
Quelques mois auparavant, début octobre 1968, pendant le Salon de Paris, la nouvelle avait été rendue publique. Maserati en avait profité pour présenter sa nouvelle Indy (enfin dotée d’une moteur V8 propre à rivaliser avec les V12 Ferrari et Lamborghini) et Citroën dévoilait sa GS, couronnée peu après « Voiture de l’Année » à une époque où cette distinction avant une véritable signification.
Les chiffes qui circulent alors font état d’un prix de rachat compris entre 95 et 105 millions de francs versés à la famille Orsi, Citroën se chargeant d’apurer les dettes de Maserati en mettant sur pied avec les banques et les principaux, créanciers, un moratoire sur 5 ans. C’est loin d’être une mauvaise affaire pour Citroën qui récupère un nom prestigieux, un matériel humain de première valeur, un réseau mondial susceptible de commercialiser une voiture de prestige comme Javel pense à en produire – avec un carnet d’adresses important sur le marché américain- et un stock de 23 voitures de route non encore livrées et non inclues dans l’accord initial (dont deux Ghibli pour le Shah d’Iran, grand amateur de Maserati….) Dix-sept personnes sont licenciées de l’usine de Modene (service administratif et financier) mais l’intégralité du staff technique est conservé. A sa tête, l’ingénieur Guilio Alfieri, âme véritable de la firme au Trident, qui travaille déjà à réduire le V8 de l’Indy en V6 pour le faire entrer sous le capot d’une … certaine SM.
Depuis 1966, la firme aux chevrons (propriété de la famille Michelin) est dans une mouvance extrêmement dynamique. Citroën S.A – la société mère - rassemble une vingtaine de filiales et passe des accords tous azimuts. La fusion-absorption avec Panhard en 1965, l’accord avec Berliet en juillet 1967 conduisant à une prise de participation majoritaire, celui avec Wankel et NSU qui donne naissance à la COMOTOR au Luxembourg (l’aventure du moteur à piston rotatif….), l’accord de préconisation lubrifiants/carburants exclusif avec Total, doublé d’un programme de recherche et d’un partenariat en compétition.
Le 25 octobre 1969, un autre accord de coopération est signé, nettement plus ambitieux celui-ci : Citroën fonde une holding avec Fiat dénommée PARDEVI, dans laquelle la firme italienne détient 49 % et Michelin 51%. Il y est question de « coopération technique », de « fusion des réseaux » et « d’investissements industriels commun ». En 1973, Fiat – devenue entre-temps propriétaire de Ferrari – se retire de la PARDEVI et cède ses parts à Michelin déjà majoritaire. Que s’était-il passe ? Citroën, rallié au style des Michelin, n’avant pas accepté de collaborer avec Fiat, pas plus qu’il n’avait consenti à collaborer avec Peugeot quelques années plus tôt. Citroën n’était pas prêt à ouvrir ses bureaux d’études à son associé italien, Fiat découvre un réseau commercial Citroën aux anciennes manières, peu enclin à accepter une autre marque. La formule « Fiat rate quelques fois une voiture, Citroën rate souvent des marchés », se confirmait
Pourquoi Citroën vendit Maserati ? …En une phrase, parce qu’il n’y avait pas d’autre solution.
En mai 1974, la situation de Citroën apparaît comme catastrophique. Il y a près de 120.000 voitures en stock et un trou de 510 millions de Francs, appelé à doubler d’ici à la fin de l’année. Les comptes de Maserati ont contribué à plomber le résultat de la firme française dans une proportion d’environ 30%, Citroën s’étant mis dans l’idée de renouveler totalement la gamme en 1970 (Bora, Merak, Khamsin) sans parler de la Quattroporte II dessinée par Bertone, reprenant la quasi-intégralité des organes de la SM, mais qui ne fut jamais commercialisée, le divorce étant intervenu entre-temps.
Il y a donc le feu à la maison Citroën. Par l’intermédiaire du président de Citroën, François Rollier, Michelin – actionnaire majoritaire depuis 1935 – annonce lors d’un conseil d’Administration extraordinaire (juillet 1974) que la société Citroën est en état de quasi- faillite. Avec l’aval des banques Lazard et Paribas, la famille Michelin cherche un repreneur et se tourne « naturellement » vers Peugeot, désormais constitué en holding familial sous l’appellation groupe PSA Peugeot Société Anonyme (Peugeot avait failli entrer dans le capital de Citroën en 1963). En décembre 1974, Peugeot se porte acquéreur de 38.2 % de Citroën avec la bénédiction de l’Etat qui accorde un prêt d’un milliard de francs sur 15 ans. Ce n’est que 30 septembre 1976 que les actionnaires ratifient la naissance de PSA Peugeot Citroën. Entre-temps, Peugeot à couper les branches mortes, dont le moteur rotatif n’est pas la moins grosse avec le gouffre financier des expériences M35 et puis GS Birotor (GZ) qui aura coûté au bas mot, 30 millions de francs à l’époque à l’entreprise.
Le 27 mai 1975, Citroën annonce que Maserati est mis en liquidation judiciaire. A Modene il reste 38 blocs V6 embiellés qui partiront en France. Ensuite, plus un seul moteur ne sera fabriqué par Maserati pendant 6 mois, avant le rachat par Alejandro de Tomaso ! En septembre 1975 par simple communiqué, Citroën confirme que la production de la SM est définitivement stoppée. Par rentable, inadaptée à la crise énergétique, trop chère …. Sa dernière apparition sur un tarif-client date du 19 avril 1975 affichée au prix de 84.000 F. En 5 ans, elle a pratiquement augmentée de 40.000 F !
Les dernières voitures assemblées chez Guy Ligier dans son usine d’Abrest, dans l’Allier, partiront presque toutes pour l’exportation, Peugeot ne voulant plus que le réseau se mobilise pour une voiture jugée « invendable ». Sur ordre direct de PSA, on procédera d’ailleurs à la destruction pure et simple de châssis roulants (sans moteur) plutôt que d’en terminer l’assemblage final. Ligier comptabilisera ainsi 27 voitures ferraillées, Citroën réduisant ce chiffre à 7 voitures…..Conséquence indirecte : Guy Ligier – qui avait signé avec Citroën un accord de distribution de ses JS2 à moteur SM - se retrouvera sans moteur et sans réseau fin 1975. Certes, le modèle avait une diffusion confidentielle mais ce n’tais pas fait pour augmenter sa popularité.
Source : Essai Auto SM Maserati Numéro collector n°17H Spet/Oct/Nov 2006